Il fut aussi surpris que tout le monde de cette victoire, ce qui ne l’empêcha pas pour autant de la savourer pleinement. Deux ans plus tard, il manqua de peu la Triple Couronne avec le poulain Dastur qui finit second dans les 2,000 Guinées et le Derby.
Cependant, le défi Classique le plus remarquable de son Altesse fut lancé dans le St Leger en 1932. Quatre chevaux coururent sous ses couleurs, et ils prirent quatre des cinq premières places, avec Firdaussi terminant devant Dastur, alors que Udaipur et Taj Kasra finissaient 4ème et 5ème, avec près de cinq longueurs couvrant les cinq premières places.
Seulement trois ans plus tard, Friar’s Daughter, la mère de Dastur, tenait la vedette grâce au produit de son croisement avec Blandford, Bahram, un authentique gagnant de la Triple Couronne. En effet, Bahram fut le seul cheval entre les deux guerres mondiales à gagner les 2,000 Guinées, le Derby et le St Leger, en 1935. Frank Butters, qui prit la charge des chevaux de l’Aga Khan après une dispute avec Richard Dawson, affirma que Bahram était le meilleur cheval qu’il eut l’occasion d’entraîner. Il ajouta pourtant que "comme Bahram était très froid, et qu’il n’avait jamais été battu, je ne connaissais pas sa vraie valeur."
Les parieurs avaient bien prédit l’arrivée de ce Derby en installant Bahram favori, mais l’année suivante ils se trompèrent une fois de plus et ce fut Mahmoud (monté par Charlie Smirke) qui devança de deux longueurs son compagnon d’entraînement Taj Akbar monté par Gordon Richards. Sur ce terrain très léger, deux records furent battus. Le temps de 2 minutes 33 secondes réalisé par Mahmoud demeure le plus rapide chronométré à ce jour, alors que l’Aga Khan demeura jusqu’en 1955 le seul propriétaire en 150 ans ayant eu le gagnant et le second du même Derby.
Pendant la guerre, pour des raisons financières, l’Aga Khan dut prendre la décision de vendre ses vainqueurs de Derby plutôt que d’aspirer à améliorer son record. En 1940, il se sépara de Bahram et Mahmoud pour 60,000 livres, une fraction de leur valeur sur un marché ouvert. Blenheim les avait déjà précédés aux Etats Unis où il devint tête de liste des étalons en 1941. Mahmoud, dont les produits étaient mieux adaptés aux conditions américaines que ceux de Barham, fut tête de liste en 1946 et tête de liste des pères de mères en 1957.
Quand la paix revint, l’Aga Khan recommença à investir. Son fils, le Prince Aly Khan, qui comme l’actuel Aga Khan était très bon analyste de courses, avait entrevu chez My Love, lors de sa victoire dans le Prix Hocquart, le potentiel pour Epsom. La moitié du poulain fut acquise à Leon Volterra pour 15 000 £ et il courut sous le nom et les couleurs de son nouveau copropriétaire. Avec un nom aussi romantique que My Love, il était sûr d’avoir la faveur du public. Le jockey, Rae Johnstone, très critiqué pour sa défaite dans un Derby d’avant-guerre sur le grand favori Colombo, rectifia cette fois les choses en s’imposant à la suite d’une belle course.
Une victoire encore plus populaire sous ses couleurs fut celle de Tulyar en 1952. Sa renommée était due en grande partie à un amusant télégramme de la part du jockey Charlie Smirke qui fut lu pendant le déjeuner organisé par le Press Club, le jour du Derby : "J’espère que mercredi à 15 heures 40 je pourrai dire ’What did I Tulyar’ (jeu de mot anglais se traduisant par : Que vous avais-je dit ?)".
Les bookmakers anglais ne partageaient pas l’enthousiasme de Smirke et on pouvait le trouver à la cote de 100/8 quand s’ouvrirent les paris sur l’hippodrome. Cependant un énorme pari public prit place et Tulyar partit favori à 11/2. Il gagna de trois quarts de longueur devant Gay Time, monté par un adolescent nommé Lester Piggott.
Quand l’Aga Khan décida de vendre Tulyar, il accepta une offre beaucoup moins élevée de la part de l’Irish National Stud, et refusa une meilleure proposition faite par l’Américaine Mrs Whitney Tippett. Ceci calma en grande partie la controverse soulevée par la vente de ses deux précédents gagnants de Derby à des propriétaires et éleveurs américains.